Les hétéros font bander les pédés

Il y a 15 jours, sur Tumblr, une ado a dit quelque chose de très drôle. Selon elle, il devrait y avoir une version porno pour chaque film qui sort. Ça devrait figurer dans les bonus du DVD, comme une version alternative mais plus réelle. C’est étrange qu’une teenager ait sorti ça, c’est ce que je pense depuis toujours.

Mon regard sur le porno hétéro a beaucoup évolué depuis dix ans. Pendant des années, je considérais la production hétéro avec dédain. Je considérais les films gays comme largement supérieurs, à tous les niveaux. C’était mieux produit, la mystique entourant les acteurs stars était mieux développée, c’était mieux filmé, c’était safe (il y avait des capotes) et les jaquettes de DVD étaient plus belles, etc. Pour moi, les sex-shops de la rue Saint-Denis et de Pigalle représentaient la misère sexuelle – que l’on sent aussi dans les sex-shops gays – mais le porno X était surtout celui de Canal +, ringard ;  même si, de temps en temps, certains films porno US étaient bien produits avec des mecs si beaux qu’on sentait bien qu’il y avait autre chose dans le X que la sélection merdique de Canal.

Recueilli dans son jardin secret, un homme doute

Le but de ce papier, c’est d’expliquer comment un gay hypergay, très séparatiste en terme de sexualité, peut en arriver à apprécier le porno hétéro. Il faut d’abord comprendre qu’à l’intérieur même du porno gay, j’ai énormément évolué ces quinze dernières années. Avant, je regardais avec méfiance les films qui utilisaient des acteurs hétéros pour les gays, comme dans le cinéma d’Europe centrale ou le cinéma brésilien de Kristen Bjorn. Je trouvais que cela chiffonnait les critères idéologiques du porno gay dans le sens où les acteurs doivent être gays dans la vie. Savoir que ce qu’ils font sexuellement dans la vie ressemble à ce qu’ils font sur film est un énorme fuel à fantasme puisqu’on les voit baiser presque « pour de vrai » (une illusion, mais réelle dans un sens).

Et puis Jean-Noël René Clair est arrivé et il nous a montré qu’un homme était beau quoi qu’il fasse, qu’une bite était belle no matter what, et il a incorporé cette idée que les gays voulaient voir des hétéros baiser entre eux, ou baiser les nanas, et JNRC a eu un énorme impact sur nos divisions mentales. Au début, il faisait surtout du solo et là, pour la première fois, on avait enfin la possibilité de voir des hétéros se branler devant nous, voir comment ils font, surtout quand ils viennent de coins paumés du sud de la France, du Brésil, d’Europe centrale, et même d’Afrique. Le paysage géographique sexuel s’élargissait énormément, on sortait du cadre strict du cinéma gay avec ses codes, ses corps souvent formatés (presque tous rasés à l’époque) et surtout des gueules, des mecs de tous les jours qui nous hallucinaient par leur beauté et leur envie de briller, sans parler de ces putain de jets de sperme qui traversaient la pièce. C’était une révélation.

JNRC, Hervé Bodilis et Stéphane Moussu ont préparé la base du changement érotique gay. Quand on a réalisé que tous les acteurs de Budapest – hétéros pour la plupart – parvenaient à baiser d’autres mecs sans le moindre état d’âme, et bien en plus, on s’est dit: « Ben, un mec hétéro qui baise comme ça avec un autre mec, moi je demande à voir, et le plus vite possible merci ».

Intrusion féminine en terrain hostile

Intellectuellement, on a commencé à trouver excitants ces mecs parce qu’on voyait très bien qu’ils n’étaient pas gays et ça nous a fait sortir de nos ornières politiquement correctes où un film porno gay devait être gay à 100%, et même 150%, si possible. Ensuite, les réalisateurs gays très célèbres comme Joe Cage ont commencé, très rarement, à mettre une fille dans un scénario et on voyait alors deux acteurs baiser avec elle, c’était bi mais plus que ça, une sorte d’hérésie sexuelle qui s’est trouvée très efficace dans des films comme « Crossing The Line – Cop Shack 2 ».

Même Raging Stallion, un studio macho où on ne rigole pas avec l’orthodoxie gay poilue hardcore, a commencé à mettre en bonus de DVD de « Grunts »
une scène avec l’acteur porno Brodie Sainclair et une fille et on peut dire que c’est pratiquement la meilleure scène du coffret de 3 DVDs. Et puis, il y a des acteurs porno gays super connus qui ont vraiment une sexualité bi comme Shane Rollins qui sont toujours au top dans n’importe quel rôle.

Tout ceci nous a amenés à regarder le porno hétéro avec curiosité. Tout le monde a chez soi une vieille VHS de Canal + avec un film particulièrement bon qui, quand on le regarde après l’avoir oublié un an ou deux, fait exploser votre libido comme si vous aviez un rush pas très maîtrisable. Parfois, on sait que certains jours, on se sent limité par une collection de films gays pourtant particulièrement riche et mettre ce film avec Black Stallion ou Joachim Kessef, c’est tellement bandant que c’est comme si on mettait sa propre horloge érotique à l’heure – du genre OMG c’est tellement facile – comme une vidange mentale.

Le problème avec le porno hétéro et les gays, c’est qu’on veut voir le mec. Pour les pipes ça va, on voit la bite même si on n’aime pas trop comment les filles font ça, avec leurs ongles et leurs doigts tout fins, et tout le cinéma qu’elles font souvent à miauler surtout quand la bite du mec est énorme. OK, certaines savent y faire bien sûr, mais on a toujours cette idée que les mecs savent mieux sucer parce qu’ils comprennent mieux comment une bite réagit, comment ça fonctionne. Ensuite le foreplay est bandant, c’est excitant les mecs qui font ça bien et les pénétrations sont aussi excitantes si le réa ne passe pas son temps à montrer la nana qui gémit et ses seins et tout ça, parce que c’est pas ce qui nous excite, c’est l’action du mec et souvent on doit baisser le volume parce que la nana qui crie à tue-tête c’est pas ça non plus.

C’est pas pédé, c’est tout doux

Ce qui est par contre irrésistible, c’est le mec ou les mecs. Comment ils bougent, les positions qui sont parfois spécifiques du porno hétéro, le côté direct de l’action, le passage du vaginal à l’anal et vice versa, cette facilité hétéro qui renvoie à une norme sexuelle sociale qui a un fort potentiel érotique. Ce que vous ne savez pas, c’est que les gays aiment ça parce que le porno nous donne la possibilité de voir les hétéros qui nous rendent barges chaque jour dans la rue, au cinéma, dans le sport et la vie de tous les jours. Le porno a entériné l’incroyable progression érotique de l’homme des 30 dernières années. C’est un homme objet à travers la mode, la télé, le cinéma, tous les médias. Désormais sur Tumblr je poste des photos de mecs et la répartition est à peu près équilibrée: 50% de mecs hétéros, 50% de gays. Mais ce qui est le plus beau, c’est cette proximité avec des hommes hétéros ou des jeunes à poil qui ont toujours été innaccessibles pour nous. Le porno hétéro nous permet d’avoir un lien avec une sexualité brute de mecs qui sont notre source N°1 de fantasmes, depuis toujours et ceci jusqu’à la fin des temps. Les hétéros font bander les pédés. Bien sûr, nous aimons les gays et personne ne peut dire que je n’aime pas les gays, j’ai basé toute ma vie sur ça. Mais ce qui nous rend gay, ne l’oublions jamais, c’est notre émerveillement devant les mecs hétéros que l’on voit partout, dès l’âge de 5 ans, quand on réalise que c’est ça qu’on aime le plus au monde, pas les filles.

Il y a cette rugosité chez l’homme hétéro qui nous attire, cette envie d’aller droit au but, de dépenser cette énergie physique, cette force concentrée dans les muscles et la bite, cet exutoire du sport, cette manière de bouger dans le sexe qui n’est pas exactement la même que dans le porno gay. D’abord, dans ce dernier, il y a une sorte d’égalité de genre, on est entre hommes. Dans le porno hétéro, c’est beaucoup plus complexe car il y a les rapports de hiérarchie entre homme et femme, ce qui fait que tout est plus risqué socialement­ mais très érotique aussi.

Mais je veux revenir sur mon point central. La beauté des hommes hétéros. Le porno nous donne l’occasion, la seule, de nous approcher d’eux. Quand vous allez dans un lieu public comme une gare (j’écris ce texte dans le Thalys vers Amsterdam), vous avez rencontré dans la gare des centaines d’hommes bandants et le porno est le seul moyen de regarder des hommes que l’on n’aura jamais. Comme les hétéros avec les femmes qu’ils n’auront jamais et qui arrivent, grâce au porno, à vivre une proximité impossible à satisfaire. Mais chez nous les gays, c’est encore plus fort parce qu’on est gay et vous, vous êtes hétéros et c’est donc impossible, on n’a pas la même orientation sexuelle donc on ne pourra jamais avoir ça avec vous, à moins de passer par la prostitution ou par la chance inouïe de rencontrer un bisexuel.

Mr. Pete, BGBM hétéro

Notre époque est excitante car nous n’avons jamais été, dans l’histoire de la sexualité, aussi proches. Les hétéros s’intéressent à la sexualité gay, ce qui n’était pas vraiment le cas avant. Et les gays ne sont plus autant dans le séparatisme sexuel, surtout les jeunes. Il y a de plus en plus de bisexuels qui s’assument. On peut très bien imaginer des hétéros et des gays en train de se branler devant un porno sur écran plat dans un living room, comme le montrent les milliers de photos sur Tumblr. Et ça, en soi, c’est déjà un énorme fantasme gay qui se réalise enfin, le genre de truc qu’on voyait avant uniquement dans les dessins érotiques imaginaires. Rien que d’y penser, ça me donne un boner. Cela veut dire que le partage du plaisir est accru et que la peur s’estompe (et c’est le moins que l’on puisse dire quand deux millions de mecs, hétéros ou pédés, se mettent à poil dans leur salle de bains pour se photographier et balancer ça sur Internet). Les hommes hétéros se montrent désormais sans avoir le moindre problème à l’idée d’être admirés par des millions de gays, regardez Ben Cohen.

Ben Cohen, rugbyman gay-friendly

C’est sans précédent. C’est ce qui rend le sport et la pop si érotiques. Quand on imagine un footballeur ou un rugbyman hors du stade, c’est souvent pour fantasmer sur sa vie sexuelle. Un homme avec une telle énergie, avec de tels muscles, c’est forcément une bombe au pieu. Teddy Riner, hello ? Pareil pour les femmes athlètes. Il ne faut pas croire qu’on les admire uniquement pour leurs performances sportives.

Le porno hétéro est donc une affaire de mecs pour les gays. Et tout le monde veut jouer dans un porno de nos jours, donc ce n’est que le début. La célébrité que l’on peut obtenir dans le porno est illimitée. On n’a même pas besoin de performer pour devenir une star du porno. Il y a des mecs à poil qui deviennent méga célèbres sur Tumblr sans avoir joué un seul porno. Les gens sont apeshit de les voir si beaux, si impudiques, si open, avec une bite si énorme aussi. Leur potentiel est global. Le porno est en train de montrer une nouvelle génération de blacks, d’arabes, d’asiatiques, de latinos qui était impossible à voir il y a encore 10 ans.

Bref, le porno hétéro rapproche des hommes qui étaient éloignés les uns des autres. On est de plus en plus de gays à être énormément à l’aise avec les hétéros parce qu’ils comprennent qu’au-delà de l’orientation sexuelle, on a la même bite et ce qui était vu comme hétéro normatif, ou impérialiste machiste, en fait on s’en fout. On a le besoin de jouir et il est le même. Et si ça vous pose un problème, GTFO. On est des dudes.

Enfin et surtout, tout ça est une question de voyeurisme. Avant, les gays ne voulaient pas voir les filles dans les pornos hétéros. Et les hétéros n’avaient sûrement pas envie de voir des films gays dans lesquels il n’y avait pas de femme, ils voulaient tous des films avec des lesbiennes (qui n’étaient pas lesbiennes mais bon). Aujourd’hui, les gays sont curieux de voir des mecs hétéros avec des bites énormes (à Amsterdam, je me suis acheté un film avec Kid Bengala) et les hétéros sont intéressés par l’esthétique et les pratiques sexuelles des films gays. Ce n’est pas encore le grand mélange, mais c’est une curiosité qui va dans tous les sens et qui accentue la mixité raciale, les pratiques érotiques (le porno japonais ne ressemble à rien d’autre), les relations inter-générationnelles (et on ne parle pas de pédérastie ici, mais un homme de 18 ans qui baise avec une femme de 45 ans, c’est fort). Le voyeurisme est général dans notre société, c’est ce qui motive « X Factor ». Au lieu d’être considéré comme une tare, ce voyeurisme est ce qui nourrit la destruction des barrières mentales sur le sexe, et donc sur les identités. Le porno comme moteur social.

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  • Super article, j’ai beaucoup aimé mais ça m’a rappelé ô combien j’ai des lacunes niveau porno. Tout ça me complexe un peu niveau culture.

  • Cet article est magique… Je pensais la même chose sans jamais avoir pu mettre des mots dessus waow un grand Merci

  • Vous m’avez sorti un putain d’article, là !

  • Dider rocks again !

  • Great!
    (bien que l’évocation du « rapport de hiérarchie » entre hommes et femmes soit un peu maladroit…)

    C’est le même genre de fascination pour une fille qui regarde du porno gay (enfin je parle pour moi)

  • Je suis amoureuse de la conclusion. Tellement vrai.

  • N oubliez pas de visitez un coffee shop ou deux entre deux Porns…

  • je ne suis pas tout à fait d’accord sur l’argument du voyeurisme positif (vu dans sa généralisation sociétale). c’est l’éternel débat entre le règne de la transparence des pratiques ou celui de la sphère privée, lequel des deux est à protéger/favoriser …
    le côté « compétition » inhérent au show off (internet etc) d’aujourd’hui me fait franchement chier, et ce culte de tout montrer -parfois dans le mensonge pour ne pas perdre la face socialement, la course à qui à la vie la plus incroyable- me fait penser que les bénéfices que le voyeurisme pourrait générer sont bien petits par rapport à la merde mentale entretenues.
    (je ne sais pas si c’est très clair, mais sinon l’article est très bon ahah)

  • Super article! Un léger malaise m’avait habité quand j’avais remarqué que la photo de moi que j’avais soumis à un tumblr féminin devait quasiment 80% de ses notes à des blogs gays. Une autre chose que peu d’hommes hétéros s’avouent et donc disent : on aime les bites. On aime bien les regarder, les comparer à sa quéquette chérie et souvent ça va plus loin. Trop d’hétéros pensent qu’aimer voir des bites, c’est avoir envie de se la prendre dans le fion alors que ça n’a RIEN à voir, ce sont les mêmes qui te filent des liens de mecs à la queue énorme, les mêmes qui te parlent de ce mecs qui pissait à côté d’eux dans un bar et qui en avait une sacrément épaisse. Il m’arrive de mater des porno gays, juste pour voir des bites et de belles éjacs. Certains parleront d’homosexualité refoulée (cette expression galvaudée), pour moi c’est juste que certaines frontières ont été dépassées parce que ce serait dommage de se limiter à la notion de plaisir communément acquise…

    Des types comme Kid Bengala, Ramon ou Chris Strokes sont à mon sens d’excellents performers. Bon allez, à quand un article d’un mec hétéro qui aime le bites sur Le Tag? *fouille les archives pour voir si c’est pas déjà fait*

  • Je crois que je n’ai jamais parcouru un tel concentré de confusion mentale, de prosélytisme déplacé, d’illettrisme et de vulgarité qui s’ignore ; pourquoi ne pas confier la rédaction d’une telle vignette à quelqu’un qui pompe des mecs mariés régulièrement ou des ouvriers sans pourtant en faire des thèses de troisième cycle ? Voilà qui, me semble t-il, aurait été à la fois plus vivant et de meilleur aloi ; quant au style, la prochaine fois, on ira plutôt voir du côté de Grisélidis Réal ; on aura alors quelque chance de rire en lieu et place de ce pathétique panneau publicitaire pour frustrés de première main.

  • « DE MEILLEUR ALOI »? Mais c’est qui cette princesse au bois dormant qui se réveille après 3 siècles? Confier la rédaction d’unte « TELLE VIGNETTE »? Ben en tout cas c’est pas à toi qu’on va le demander parce que le style qui est le votre, chère damoiselle, est particulièrement empoulé. Bon faut dire, il a écrit ça à 3h du mat, il vallait mieux prendre une « TISANE DE VERVEINE » LOL

  • Toujours aussi pertinent ce M. Lestrade ! Et oui, avant d’être gay ou straight, on est d’abord des KEUMS. C’est tout de même un sacré point commun qu’on a un peu tendance à oublier à force de tous rentrer dans des cases…
    Bon, faites tourner les plans circle jerk, maintenant !

  • a ce didier , ces écrits , ces combats m ont toujours impressionne, fondateur d act up paris , intellectuel révolutionnaire a la tète bien pleine . un mec gentil en plus . parfois bien agressif avec ça plume l animal, son clavier plutôt .

  • Lol je suis gay et je fais bander les hétéros comme on explique ca ?

  • C’est vrai qu’il y a dans le porno hétéro pas mal de jeunes types bien foutus : un Will Steiger, un Manuel Ferrara, un Preston Parker… Les mater en train de baiser une gonzesse est un vrai régal…

    Par sa seule présence, la fille met encore mieux en valeur les caractéristiques masculine du mec : carrure, musculature, peau foncée, poils, dimension du sexe…

    Il existe des séries porno spéciales, consacrées à l’exposistion des males hétéros au public gai. Il suffit de les montrer en train de baiser une fille :
    – la série Corbin Fisher « ACS » (Amateur College Sex) : https://www.corbinfisher.com/#acs/viewall
    – la série « Straight Guys for Gay Eyes » (hommes hétéros pour regards homo) : http://www.sg4ge.com/home.php

    J’adore tout spécialement les gang-bangs et les doubles pénétrations. Ici, les cuisses, les glands et les sacs de couilles des mecs doivent se toucher. Parfois du sperme atterrit dans les poils du copain…. Ce sont des scènes de grande complicité masculine, très homoérotiques… :

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