Les tags parfaits de Carter Cruise

Avec Carter Cruise, la croisière s’amuse. En compagnie du street artist Sabe KST, la belle graffe les murs de Brooklyn. Une actrice pornographique et un écrivain du graffiti ont plus en commun qu’il n’y paraît: la beauté du geste, l’honneur de représenter un art encore trop mésestimé, le secouage nerveux du poignet, les mêmes vélléités d’acrobate, une identique quête de sensations fortes. Et le graffiti est un cumshot. Chaque message éjaculé sur un mur est un tag parfait. Les lignes se créent, s’esquissent, se croisent, et là l’émotion nait, à l’image des courbes d’un corps peu à peu dénudé.

Même si, face à l’empressement de la souriante pornstar, Sabe se sent obligé de jouer au mentor érotique : à l’inverse de la frénésie sexuelle, le mouvement doit être précis, juste, et surtout lent. Douceur et habileté. Le handjob prodigué avec tact. Beau couple que cette alliance entre le porno (de ce que beaucoup nomment encore le mauvais érotisme) et le polémique art de rue, ou vandalisme conceptuel. Une même histoire socioculturelle lie ces deux expressions du corps : un incessant aller-retour amour/haine entre l’amateur et l’industriel, entre la vidéo sur cam/le graff vite fait bien fait, et la récupération de l’artiste devenu icône par l’empire business tout-puissant.

En somme, tout ce que l’on peut voir dans Faites le Mur, le fameux documenteur de Banksy. Le graff’ peut très bien finir sur la pochette d’un album de Madonna, et le porn nous convie à célébrer à la fois le tenace amateur #doggystyle et la superproduction mastodonte du style Caligula. Mais persiste également entre porn et street art cette dichotomie entre la théorisation intellectuelle sciuntante des galeries d’art et la spontanéité de la masturbation, la branlette mentale et la branlette pure. Libre à nous de privilégier la branlette brute. Nature.

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Se sentant artiste engagée, la taquine Cruise y va évidemment de son discours militant, parsemé aux quatre coins du béton urbain. Afin de fustiger la politique des filtres visuels inhérente aux réseaux sociaux, ces cache-merveilles masquant les seins des utilisatrices, Carter immortalise sur les murs son FUCK YOUR FILTER! Niquez vos filtres et libérez les poitrines ! De vrais corps sans tabous et superficialité, un vrai art sans frontières. Le revendicateur “fuck la censure” devient le point de ralliement entre porn et art de rue. Ecriture libre et sexe libéré. Le tag parfait. Authentique. #FuckYourFiltrer.

 

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