Le porn en berne

Les pornographes sont inquiets : le coup que vient de leur porter Google n’est que le dernier d’une série qui commence à se faire longue. Depuis deux ans, les partenaires commerciaux de l’industrie se dérobent à tour de bras, quitte à faire dans la discrimination ; les deux services de paiement en ligne Chase et Paypal ont supprimé les comptes des porn stars inscrites chez eux, Amazon a fait disparaître leurs Wish Lists sans prévenir et Chase Bank a jugé bon de clôturer leurs comptes. Malheureusement, ce n’est pas tout.

Brad Armstrong, réalisateur vétéran chez Wicked Pictures, a également remarqué que les plateaux de tournage refusaient de plus en plus souvent de lui louer leurs locaux. Il conclut : « Le problème ne se limite pas à Google. » Dans un article pour le Daily Beast, l’actrice Aurora Snow essaye de comprendre ce qui se passe avec Alec Helmy, le patron d’XBIZ. Il a une théorie : le problème, c’est la réputation de l’industrie. « Peut-être que notre rentabilité est tombée si bas que ça ne vaut plus le coup de s’associer à l’industrie. Peut-être que l’équilibre risque/récompense n’est plus ce qu’il était. » explique-t-il.

aurora

Aurora Snow

Les revenus générés par la pornographie ne suffisent plus à faire oublier une image difficile, particulièrement salie ces derniers temps. Aurora Snow évoque les scandales liés au VIH, des acteurs testés séropositifs à la campagne diffamatoire de l’Adult Healthcare Foundation en faveur d’AB 1576 ; nous, on pense aussi à la multiplications des études foireuses et des mouvements aveugles qu’elles alimentent, au travail de sape de lobbyistes menteurs et arrivistes, à l’Islande qui tente à nouveau d’interdire la pornographie, aux efforts de censure déployés par le gouvernement anglais et par les administrateurs de Vine… La ghettoïsation va bon train alors que le porno n’a jamais été aussi mainstream.

Avec tout ça, pas étonnant que les partenaires de l’industrie finissent par fuir. Ne soyons pas alarmistes, le porn est affaibli mais pas du tout agonisant. Par contre, le nombre croissant d’attaques à son encontre est inquiétant ; la fumée retombée, l’ultime volte-face de Google ressemble plus à un aboutissement logique qu’à un impact soudain. Les pornographes de profession sauront trouver des solutions pour rester rentables, on ne se fait pas trop de souci à ce sujet. On aimerait surtout qu’ils soient fréquentables, ça pourrait régler pas mal de problèmes, mais ils n’ont pas l’air décidés. Advienne que pourra.

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  • Je me demande… A terme… Est-ce que l’interdit ne serait pas vendeur ?
    On sait que pas mal de gens ont le vice de préférer ce qui est interdit a ce qui est mainstream et autorisé, et que ce serait gâcher leur plaisir de rendre une chose mainstream. Bah oui, c’est plus aussi drôle…
    Est-ce que rendre le porno plus difficile d’accès via internet ne pourrait pas, a terme, lui permettre d’échapper à la gratuité liée au piratage ? A en revenir au marché des sex-shops, sous le manteau ? Avec toute l’excitation liée à l’interdit ?

    Pour ma part, j’aimerais qu’on arrête de diaboliser le sexe, et j’aimerais que le porno soit vu comme quelque chose de normal, naturel, amusant et sain. Et non comme quelque chose de sulfureux.
    Mais je me demande si il n’y en a pas qui pense, justement, a miser sur cette diabolisation pour faire renaitre un marché.

  • D’autant que pas une journée ne passe sans que les médias (télés, radios, journaux, magazines, médias sociaux) ne parle, par l’entremise des sacro-saints psychologues, sexologues, psychiatres, psychanalystes et autres intervenants sociaux, d’addiction sexuelle, probablement le meilleur vendeur des pathologies psychiques modernes, ou du moins en voix de le devenir. Et je ne parle même pas des films et des séries qui traitent du sujet – et ils sortent de partout, comme furieusement affamés de morale.

    À un moment donné, ça te pénètre là où il faut et bien profond dans l’inconscient collectif, les bourses (à défaut des couilles) se vident, les cliniques (à défaut des vagins) se remplissent, tout le monde est malheureux, sauf l’industrie psycho-pharmaceutique, qui a compris depuis quelques décennies qu’il n’avait rien de plus lucratif de la Peur.

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