Putain de lunettes, le porn pour espion

Si toute la planète a rêvé en même temps de voir les Google Glass dérouiller le POV-jeu, Google, en bon père de famille, a tapé une énième fois du poing sur la table : “ces satanés pornocrates n’auront pas mes putain de binocles !”. D’ailleurs il ne veut plus entendre parler de ces gens-là depuis un moment, s’il en voit traîner autour de sa fille, il l’enfermera dans sa chambre sans internet. Deux-points-espace-crochet-ouvert.

Fuckingglasses n’a pas attendu que les puritains de Moutain View donnent leur feu vert pour voir débarquer du POV avec des lunettes flanquées sur les tempes pour mieux viser le vice. Ils sont juste allés sur ces sites d’espions et de stalkers professionnels pour s’offrir ce qui fait la joie des magazines d’investigations depuis des siècles avant que tous les DA d’agence en portent avec leur montre Casio de merde : des lunettes de nerds avec caméra intégrée.

Gordon-Levitt

Hey salut c’est Gordon-Levitt, tu veux tourner un porn ?

Je sais c’est injuste… mais la vie est une pute

C’est avec ce slogan cynique que vous êtes accueilli sur leur site. Au premier abord, rien de très intéressant, du porn de l’Est qui joue sur le contexte de réalité, du porn à la Public Invasion et consorts, style difficile à réinventer à moins de sortir de son chapeau une petite idée novatrice, comme des carreaux d’espion du dimanche.

Le porn n’est pas la réalité mais doit fortement y tendre pour fonctionner. Voici le postulat de départ de l’ère du porn gonzo et amat qui règne depuis 15 ans sans réel partage dans l’industrie ; genre pornographique qui ne devrait sensiblement pas bouger dans les années à venir, si ce n’est jamais. A moins qu’une intégration totale du spectateur dans la narration inverse la tendance et remette du scénario dans le réservoir pour faire rugir les dollars sous le capot, comme au bon vieux temps du rock ‘n roll. L’identification est la pierre angulaire de l’excitation, sans ça, un porn se résume souvent à des gens qui baisent sans âme ; aussi intéressant qu’un lion tapant son coït annuel dans la plaine du Serengeti sans la voix de Pierre Arditi.

Un style discret qui vous fera passer incognito

Un style discret qui vous fera passer incognito

FuckingGlasses a juste eu la bonne idée de remplacer la caméra qu’on tient à la main ou le cameraman posté au-dessus de l’épaule de l’acteur par une caméra embarquée à hauteur des yeux. Beaucoup ont tenté la Go Pro frontale pour approcher le même résultat, mais avec le style de débile qui va avec et l’angle plus adapté pour filmer tes potes faire du surf à Biarritz, ça ne donne pas ce côté espion au héros ordinaire. Si le porn tend à la réalité, on a du mal à croire à un type avec une caméra qui clignote sur la gueule arpenter les rues de Prague ou Budapest à la recherche de l’amour éphémère. D’où l’idée de l’espion à grosses lunettes, autrement dit l’histoire d’un mec qui témoigne de la surpuissance de ses techniques de drague.

Le porn dont vous êtes le héros

Le gars derrière tout ça aurait pu faire une longue étude sur les mécanismes de l’excitation mais il a préféré suivre son intuition. Tout le monde n’a pas la chance d’être pick-up artist ou vendeur de voitures d’occasion. Les timides, les gens qui passent dans les rues sans siffler des meufs, qui se contentent de fantasmer dans leur tête, il a décidé de leur faire vivre par procuration ce qui semble être un fantasme universel : pouvoir baiser la première fille venue dans n’importe quelle situation. Ce qui marche aussi dans l’autre sens, mais malheureusement le POV féminin n’a pas l’air d’être un marché suffisamment juteux pour cette machine-industrie, malgré quelques rares exceptions.

fuckingglasses

Oui oui bien sûr

“Ces bonnes cruches ne sauront pas qu’elles sont filmées jusqu’au moment où elles découvriront ce site”. Le site vous prend gentiment pour des truffes mais c’est l’idée de tout porn qui joue sur la fibre public / amateur / reality, si on vous explique que les filles ont signé un contrat avec photo de leur carte d’identité recto-verso, ont empoché une somme correspondante à une grille tarifaire pré-établie et qu’elles savent très bien où elles vont finir, ça risque de vous la couper sec. N’en déplaise à Pierrot la bedaine qui pourra vous expliquer le contraire jusqu’à sa mort.

Le porn c’est de la magie noire, tout est possible, tout arrive, tout devient orgasme, même un râteau finira forcément dans un blow-job flamboyant. Et vous au fond de votre pieu, de votre siège, confortablement assis dans votre canap, sur les chiottes d’un TGV lancé à toute berzingue, un bon POV deviendra une météorite qui traversera votre écran pour vous éclater la gueule. Ça fait du bien, comme toute dose d’endorphine, peu importent les moyens d’y arriver.

La réalité augmentée

FuckingGlasses n’a pas d’autre prétention que de fournir du porn à des chalands (et seulement 33 vidéos dispo, mais avec accès au network Dirtyflix dont le faux-réalisme est un peu la spécialité), il est fort possible que cette idée de lunettes soit juste une coquetterie pour se démarquer de la concurrence, sortie d’un brainstorming embrumé. Mais on y croit, tout comme on arrive à croire à ces filles qui viennent passer une audition ou qui envoient une prétendue sextape pour se venger de leur ex.

Pire approche du monde mais qui fonctionne, la magie noire

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Le reality porn peut se résumer à ce poster d’X-Files trônant fièrement au-dessus de nos lits d’ados : I WANT TO BELIEVE. Les extraterrestres n’existent pas plus sur Terre que du porn filmé en scred dans la rue mais l’idée que ce soit possible suffit à remplir le contrat. C’est cette subtilité entre fantasme, désir et réalité qui met la pression au fond de nos balls pendant qu’un bonhomme arpente faussement les rues de Buda pour se taper une bonne kiffade.

Alors ça traîne dans les rues, la vie, ça contextualise la baise, ça passe du gonzo produit à du gonzo produit qui fait semblant de ne pas l’être (le secret de la puissance), des mots, de la drague, des filles qui cèdent gentiment sans tomber dans le vieux cliché « non non non non » du porn à papa. Le rêve, la vie comme on l’imagine en rongeant notre frein dans le métro quand une fille au regard pervers se place devant nous et qu’on n’ose pas l’aborder.

40 ans que le porn nous fait le coup de la panne

40 ans que le porn nous fait le coup de la panne

Y’a du génie dans rien, suffit parfois d’avoir l’idée de porter des lunettes d’espion pour éclater n’importe quelle prod avec villa, popotin spacial et plateform shoes transparentes. Semi-amateur, réalisme et POV, la potion magique pour encore 1000 ans de porn, une leçon donnée par l’Est qui ne s’embête pas de plans de carrière mais plutôt d’optimiser notre fap.

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