Le Fap Club aux Nuits Sonores : OhMiBod et Shibari

Le week-end dernier, on était aux Nuits Sonores avec le taulier pour un Extra des plus chauds. C’était le premier Fap Club organisé à Lyon et il était clairement question de réchauffer le 69 dans tous les sens possibles du terme. Au programme, un mix électro bien lourd par Gonzo et Matheson, des images soigneusement sélectionnées par Malo Lacroix et Guillaume de Place des Cordes venu pour l’occasion avec deux modèles pour faire une démonstration de Shibari. Personnellement, je venais plutôt en touriste, n’ayant pas de mission particulière si ce n’est être aux petits soins du chef et aller remplir sa pinte de temps à autre. Enfin, ça c’est ce que je croyais…

Lyon, le samedi 7 mai 2016. Il fait beau pour la première fois de l’année. Le soleil tape fort. Je grimpe les marches qui m’amènent à la Croix-Rousse : le Fap Club commence à 16h, mais il est 16h15 quand j’arrive devant. Remarquez, je suis toulousaine maintenant, alors j’ai une excuse. On me fait patienter dans la queue, signe qu’il y a déjà de nombreux petits curieux qui se pressent à l’intérieur. Quand je passe enfin les portes du Lavoir Public, mes yeux mettent quelques instants à s’habituer à la pénombre. L’ambiance est déjà bien posée, lumières rouges et vidéos dirty sur écran géant. Après un passage rituel au bar, je repère Gonzo, déjà à fond derrière son dj booth. Dans ma tête je me dis que ça va être parfait pour mon vibro. Car oui, j’ai l’intention de tester en conditions réelles le OhMiBod Club Vibe. C’est un petit galet vibrant créé pour se déclencher avec la musique. Il devait me servir pour la cam, mais n’ayant pas réussi à le faire sonner au bruit des tokens, je ne l’avais jamais vraiment utilisé à son potentiel maximum. Les sons choisis par Gonzo pour aujourd’hui me semblaient parfaitement adaptés.

L’avantage de ce jouet est sans aucun doute sa discrétion. Dans un coin de la salle, j’ai déboutonné mon jean et j’ai glissé le jouet dedans, ni vu ni connu. J’ai appuyé sur la télécommande (Wowowo !) et instantanément, j’ai compris pourquoi le jouet était appelé Club Vibe : il a été conçu pour ça. Je scanne la pièce, un sourire aux lèvres, profitant de l’ambiance et des vibrations qui titillent mon clitoris à chaque coup de basses dans les enceintes. La salle – un ancien lavoir – est assez petite et restée dans son état original : il y a un bassin au milieu et des lessiveuses le long des murs. Je bois ma bière tranquille et retrouve des amis dans la salle : Monsieur Bazin et Neena Amber sont là, et Pippo ancien stagiaire du Tag est venu avec son gros objectif. Personne ne se doute que j’ai dans ma culotte l’équivalent de 12 smartphones en train de me secouer. Discrètement, je sors la télécommande pour monter le jouet au niveau 2. C’est à cet instant que je croise le regard de Gonzo, qui analyse rapidement mon sourire et fait le lien avec la télécommande dans ma main : « Ha, on va te faire jouir sur la musique ! » À cet instant, ça me fait plus rire qu’autre chose.

On assiste à une démonstration de Kinbaku, plus connu chez nous sous le nom de Shibari, le bondage japonais. La salle observe Guillaume encorder sa modèle Miss Hellfire et la suspendre. Elle a l’air concentrée et abandonnée à la fois. C’est très beau à voir, captivant. La deuxième partie du spectacle est différente, Gardenia Rain s’encorde et se suspend seule : elle maîtrise totalement son art et son corps, ça me laisse rêveuse. C’est la deuxième performance live à laquelle j’ai la chance d’assister, la première étant celle d’0dd lors d’un précédent Fap Club. Cette fois aussi, je suis scotchée : le shibari, c’est très intense et très sérieux.

shibari_lavoir_public

Pendant tout ce temps, le OhMiBod a continué de me chauffer. Je commence à avoir envie de plus. Je me cale dans un coin, près du dj booth, et je monte le niveau des vibrations. Gonzo me regarde, l’air goguenard, mais moi je ne rigole plus. Le jouet est diablement efficace. Je cherche toutes les positions possibles pour réussir à le caler fermement entre mes cuisses. Je pourrais jouir, là, au milieu des spectateurs, avec mon gobelet en plastique rempli de bière dans la main. Mais Guillaume interrompt ma rêverie masturbatoire lorsqu’il vient nous voir pour nous prévenir qu’ils reprendront les cordes après la pause, pour faire un encordage simultané des deux modèles. Et soudain, je m’entends lui dire : « Vous prenez des volontaires ? Parce que ça me dirait bien ! » (Quoi ? Ah bon, depuis quand ?) Est-ce le soleil de mai qui m’a atteint ? La bière ? Le vibro ? Quoiqu’il en soit, Guillaume m’annonce l’air ravi et enthousiaste qu’il m’attend sur la scène dès que les filles seront descendues. Il me prévient cependant que comme je suis novice, il ne me suspendra pas mais me fera uniquement des figures au sol.

shibari_threesome

Je suis plutôt sereine, certaine que « ça va être cool ». Je décide quand même de retirer le OhMiBod afin de me concentrer sur ce qui va m’arriver. À peine le temps de reboutonner mon jean, je rejoins Gonzo dans le bassin au milieu de la pièce, et nous voilà pieds nus dans l’eau en plein milieu de la salle, en train de bouger nos corps sur le mix de Matheson. Cette après-midi est en train de virer au Kamoulox. Je regarde la scène où le threesome de shibari a lieu. Je me penche vers Neena et lui dis cette phrase : « Je pense que ça va être sympa comme expérience, mais ça m’étonnerait que ça me procure des sensations si intenses. Et puis, il leur fait des câlins à la fin, j’ai pas forcément envie moi, on se connaît pas. » C’est au tour d’un jeune homme du public de se faire encorder tout habillé par Gardenia Rain, il a l’air de le prendre bien, il rigole. Au moment où je le vois reposer ses pieds sur le sol, je sais que c’est à moi de jouer.

Je vais vers Guillaume et lui demande à l’oreille si j’ai quelque chose à savoir avant de commencer. Il me dit que non, pas du tout. Je lui demande si je dois enlever mon jean (Pourquoi j’ai dit ça ? Pourquoi ?). Cette fois, il acquiesce, me disant que je serai quand même plus à l’aise. Je me retrouve donc face à environ 100 personnes sur la scène en plein milieu du Lavoir Public, en culotte et t-shirt. Bon.

Guillaume me place au milieu de la scène, sous la barre en bambou qui sert à suspendre les modèles. Tout à coup, sans prévenir, il passe son bras autour de mon cou et serre. Immédiatement, je me sens décoller. Il attrape mes bras et les replie, puis passe sa jambe entre les miennes et d’un mouvement brusque, il me fait tomber à genoux par terre. J’ai le souffle court, déjà. Je le sens enrouler la corde autour de mes bras : ça y est je ne peux plus bouger.

shibari_lavoir_public

Tout ce qui suit est étrangement flou dans ma tête. Je me souviens à la fois de tout et de rien. Je revois des regards, j’entends des phrases prononcées par les spectateurs les plus proches de moi (« Elle a pas l’air bien si ? »). Guillaume m’a allongée par terre et m’a attachée la cheville gauche au bambou au-dessus de nous. Puis il a ramassé mes cheveux et les a tirés en arrière avec une longue corde qui a terminé elle aussi nouée à la barre, très haut. Il a ensuite savamment ligoté mon autre jambe. Puis, pendant quelques secondes plus rien. Je regarde tout autour de moi sans rien voir, je croise des regards inconnus mais aussi ceux de Bazin, Gonzo, et Pippo. Je vois son objectif, je le regarde tellement fort que je pourrais le faire fondre. J’ai l’impression d’être possédée.

Cordes shibari kinbaku fap club

J’entends Guillaume me dire : « Je peux y aller avec la bougie ? » (La bougie ? Allons bon, une bougie maintenant ?) Et j’ai répondu « Oui, oui, vas-y ». (Pourquoi ?) Je sens les premières gouttes de cire couler sur mon mollet. C’est vraiment très chaud, mais je n’arrive pas à savoir si ça me brûle ou si j’ai simplement les nerfs à fleur de peau. Il continue cette torture pendant quelques instants, et je m’entends pousser des cris. Puis, il s’emploie à détacher la corde qui me retenait la tête en arrière. Il l’a ensuite passée autour de ma cuisse restée libre jusqu’à maintenant. Je ne vois pas ce qu’il fait, je ne peux rien contrôler, je sens juste mes jambes remonter vers le haut. Oui, c’est ça, je suis sur le dos et j’ai les deux jambes accrochées à la barre. Et il tire. Il tire vers le haut. Mon dos décolle du sol, ma tête part en arrière. Il est en train de me suspendre, je ne sais pas quoi faire, ni comment gérer ça, je ne m’y attendais pas. Je commence à avoir mal, une des cordes me coupe littéralement la cuisse en deux. Il tire encore, et me voilà suspendue la tête en bas. C’est trop. J’ai mal, je lui dis. J’ai crié souvent tout au long de l’encordage, mais là il sent dans ma voix que c’est différent. Il me regarde et me rassure : « Tout va bien, on descend ».

shibari_lavoir_public

Je le sens me reposer au sol. Il commence à défaire les liens. Je reprends possession de mon corps petit à petit. Je refais un tour de la salle avec les yeux, mais je ne reconnais plus rien ni personne. Il m’aide à me remettre assise, et m’entoure de son bras. Je m’accroche à lui comme on s’accroche à une bouée. Je le serre, fort. On me tend un bouteille d’eau à moitié pleine, je la termine d’une traite. Je me remets debout, face à la salle, et j’esquisse une révérence. Tout le monde applaudit, moi je remets mon jean en tremblant. Les modèles professionnelles me font des sourires et me félicitent. Je descends de la scène et retourne vers le dj booth mécaniquement. Je ne sais plus où est Bazin, et l’objectif de Pippo est déjà en train de shooter la novice suivante… je crois que c’est Neena. Je prends un air détaché et fais un grand sourire à Gonzo qui a repris ses platines. J’essaie de parler mais ça ne sort pas. Je finis par m’écrouler sur lui pendant au moins 30 secondes, j’inspire et j’expire aussi profondément que je peux. Tout ce que j’arrive à dire c’est : « Je… Je m’y attendais pas. »

Neena Amber Shibari

Je cherche Bazin partout, sans le trouver. Je l’aperçois enfin, à l’autre bout de la salle. Je cours vers lui en poussant tout le monde et je me jette dans ses bras, je le serre jusqu’à sentir ses côtes bouger. Et là, d’un coup, je pleure. Des grosses larmes coulent sur mes joues et des sanglots assez violents m’échappent. J’entends plusieurs voix inquiètes me demander si ça va, je prends encore quelques minutes, mais je sais déjà que la seule réponse est oui. Je relève la tête et là enfin j’arrive à sourire : « Oui, ça va très bien. C’était génial ». Je peux enfin reprendre le cours de la soirée. D’autres personnes se font ligoter, suspendre. Moi, je plane.

Quand tout a été fini, je me suis retrouvée à table à côté de Guillaume pour le dîner. Je lui confie ma surprise d’avoir vécu quelque chose de si intense. Un sourire au coin des lèvres, il me répond : « Dès la première seconde, quand j’ai mis mon bras autour de ton cou, j’ai senti qu’on allait bien s’amuser. »

Je vous écris ces lignes avec un bleu en forme de ligne droite qui parcourt ma cuisse droite d’un bout à l’autre. J’ai aussi une marque sur le bras. Par contre, je n’ai aucun regret mais plutôt très hâte de ma prochaine rencontre avec les cordes. À Toulouse ? Avec toi ?

Photos : Philippe ‘Pippo’ Jawor

 

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