Entretien avec We Are Enfant Terrible

We Are Enfant Terrible est un trio qui nous vient de Lille, ils tapent sur des bambous et c’est numéro un. Ils naviguent entre rock, electro et 8bit avec la douce Clotilde en tête de proue. J’ai souvent vu des machines copuler salement sur leur musique, des orgies démoniaques où le fer rencontre la peau, où les pauvres mortels sont soumis à de délicieuses tortures – la perversité en stéréo. 

Ils viennent de sortir un nouvel EP : “Slice of Life”, alors on leur a posé quelques questions.

We Are Enfant Terrible est-il un groupe sexuel ?
Thomas : Pas spécialement, si ce n’est que Clotilde doit probablement éveiller des pulsions chez certains.
Clotilde : À partir du moment où tu montes sur scène, tu es forcément un peu sexuelle car tu t’exhibes devant les gens. D’ailleurs je ne suis pas la seule à éveiller des pulsions, rappelle-toi Thomas, à Moscou, un homme s’est jeté sur toi après le concert pour t’arracher ta ceinture en criant qu’il voulait te sucer !
Cyril : Si je me penche sur la définition de « sexuel » (relatif au sexe, aux caractères mâles ou femelles, aux organes génitaux, à la sexualité) je dirais oui sauf la fois où je me suis mal assis sur mon tabouret, pendant quelques grosses minutes, y’avait plus trop d’organes génitaux de mon côté.

Votre musique est perverse, c’est le reflet de vous-mêmes ou un fantasme projeté ?
Thomas : Un peu des deux ?
Clotilde : Notre musique est un exutoire, on y met donc nos joies, nos peines, nos fantasmes, nos perversités cachées ou assumées.
Cyril : C’est le reflet de nos passions musicales qui évoquent une multitude d’imageries, la transe des corps de l’électro, la sueur et l’animalité du funk et la bestialité du rock.

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=c-npP7bdalU[/youtube]

D’où vient votre énergie ? J’ai tendance à croire que sans mojo la puissance n’est rien, c’est le cas chez WAET ?
Thomas : Ça c’est une question pour Cyril et Clo, moi de l’énergie j’en ai pas énormément.
Clotilde : J e mange des baies de goji et je bois des vodkas-mate, c’est mes drogues énergétiques naturelles. Je suis assez d’accord, le mojo et la puissance sont liées. Regarde Austin Powers, sans son mojo il ne s’appellerait plus Powers.
Cyril : J’ai appris la comédie au Cours Florent pendant plus de 12 ans et il m’est extrêmement facile de mimer l’énergie. C’est de là que ça vient et d’un visionnage régulier de tous les films de Louis de Funès. Un acteur qui jouait pas mal l’énergie.

Pas mal de reprises ces derniers temps, c’est par facilité ou pour recycler de la matière préexistante pour créer autre chose ?
Thomas : Les trois réponses d’un coup.
Clotilde : Oui aussi parce qu’il y a des chansons qu’on adore. On aimerait les avoir écrites. On l’a pas fait mais du coup on les reprend et on en fait des versions personnelles, on les vit par procuration.
Cyril : C’était hyper marketé (on bosse avec les meilleurs de la place). On a su très vite que Yannick Noah préparait un album de reprises de Bob Marley et on a essayé de le coiffer au poteau.

Vous avez sorti deux ep, ils préparent l’album ou ce sont des projets indépendants ?
Thomas : Heu… C’est plutôt indépendant, mais sans l’être complètement…
Clothilde : Oui c’est plutôt indépendant dans le sens où ça ne ressemblera pas forcément au prochain album.
Cyril : C’est des petits formats qui nous permettent de tester de nouvelles choses, comme travailler avec un producteur extérieur au groupe, ou essayer du nouveau matériel (on vous conseille vivement le Fatso d’UAD, une vraie merveille pour le traitement du signal 44,1KHz).

Vous pensez qu’il est encore pertinent de sortir des albums comme on les pensaient à l’époque du vinyle ou du CD, ou il faut réinventer le concept ?
Thomas : La musique ne se consomme plus du tout comme jusqu’à il y a 10 ans. Le format album est de moins en moins pertinent (voire quasiment plus) mais il faut qu’il subsiste : c’est bon des fois de se laisser porter tout le long d’une histoire.
Clothilde : Oui si je m’écoutais moi je ne sortirais que des maxi ou des singles parce que personnellement je n’écoute pratiquement pas d’album du début à la fin. Pareil pour les concerts, les live de plus de 50 minutes me lassent. Aujourd’hui on zappe vite alors un album avec 15 chansons c’est trop long. Je pense qu’il faut en effet trouver aujourd’hui quelque chose de plus adapté.
Cyril : J’ai l’impression d’être un vieux con quand je lis mes petits copains mais moi j’aime encore beaucoup les albums. Quand tu lis un bouquin, tu ne lis qu’un chapitre ?

Chanter de temps en temps en français aide à continuer à percer à l’étranger, c’est pareil, ou ils s’en foutent ?
Thomas : J’ai l’impression qu’ils s’en foutent. Chanter en français on l’a surtout fait pour que des français arrêtent de nous demander « pourquoi vous chantez pas en français ? »
Clotilde : Oui, les étrangers s’en foutent un peu, à la limite peut-être que ça fait ressortir leur « Françoise Hardy fantasy ». Ça ne me déplaît pas.
Cyril : On attend encore l’analyse SECODIP du panel d’auditeurs (segment 12-25 ans) qu’on a commandée il y a trois mois.

Comment se déroule la création chez vous, c’est le bordel ou y’a une ligne directrice claire et précise ?
Thomas : D’abord le bordel, puis plus on avance, plus on essaye d’injecter une dose de clair et précis.
Clotilde : c’est quand même plutôt bordélique, mais on s’améliore avec le temps.
Cyril : J’irais même jusqu’à dire que sur les derniers tracks, on est plutôt bons. On a arrêté les idées foireuses et on s’est promis qu’on ne travaillerait que les idées qu’on aimait tous les trois. Pour aller plus loin et plus vite dans les titres qu’on veut sortir. On a besoin que les choses se passent rapidement. Sinon on s’emmerde et on s’épuise de la chanson avant même qu’elle ne sorte.

Si on mettait des images pornos sur votre musique, ça donnerait quel(s) tag(s) ?
Thomas : « brunette », « toys », »3D », « kissing » ?
Clotilde : #wet #minimal #animal #chaussuresdelachanteuse #batteurfou
Cyril : #rappistglasses

Et personnellement, quels sont vos tags ?
Thomas : « milf », « kissing » et « european » pour ma part, « gay » aussi parfois par curiosité mais la brutalité de ce que j’y trouve me rebute pas mal.
Clothilde : #lesgens #striptease #punchline #remplacerletitredufilmpar
Cyril : #rapistglasses

Vous regardez du porn 8-bit ? ou cette pureté est seulement sonore ?
Thomas : Si ça existe ça m’intéresse.
Clotilde : Mario et Luigi sont des gros dégueulasses.
Cyril : Pour ma part, c’est seulement sonore. Y’a pas assez de détails sur un sexe pixelisé !

L’amour avec les machines ça vous parle ? Actifs ou passifs ?
Thomas : Ouh là non.
Clotilde : Pas trop non plus, mais si ça devait m’arriver ce serait en actif ça c’est sûr.
Cyril : De quelle machine parle-t-on ? Une machine pour faire du pain ? Ça doit être pas mal, une sorte d’American Pie à la française. #baguette

Il se passe quoi dans le futur, vous avez une idée ?
Thomas : À mon avis, les écarts entre riches et pauvres vont encore se creuser, les grands groupes financiers vont continuer d’écraser les gouvernements quasiment tous impuissants, les services publiques n’existeront plus, la sécurité sociale non plus (on nous les supprimera en nous disant que c’est pour rassurer les marchés), puis après ce sera la porte grande ouverte pour les mouvements soit nationalistes-fascistes-religieux, soit marxistes (je préfère carrément ceux-là), un peu comme dans les années 30 quoi, puis après heu… Risque d’une grosse grosse guerre quoi.
Clotilde : Peut-être que les témoins de Jehova ont raison et que la fin du monde est proche.
Cyril : Y’a eu le feu, la roue, l’électricité, Internet et si je connaissais la suite, je serais certainement pas en train de vous répondre le cul assis dans mon jacuzzi au champagne.

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=jIdSlfKlRoA&list=UU3Xmx9XmqWx5caAh1qocCXg&index=14&feature=plcp[/youtube]

Et le futur du porn ?
Thomas : Ben si c’est les nationalistes-fascistes-religieux qui l’emportent ça sera interdit partout et tout le temps.
Clotilde : On sera les résistants, on organisera du sexe clandestin.
Cyril : Cf. ma réponse précédente

Est-ce qu’un jour on arrivera à réinventer le sexe, trouver de nouvelles formes de plaisir ou tout a déjà été fait et il faut faire avec ?
Thomas : Il y a déjà de quoi faire ! On doit pouvoir trouver son bonheur dans toutes les belles trouvailles de ces dernières décennies je crois.
Clotilde : Il y a toujours moyen d’être inventif. Les mutations génétiques nous ouvriront peut-être de nouvelles possibilités.
Cyril : Avec la génération Youporn qui n’a que 12-13 ans et qui taille des pipes devant les webcams du bus de la classe de neige, y’a encore une paire de trucs qui vont glisser vers une nouvelle forme de sexualité. C’est sûr et certain.

Vous écoutez quoi en ce moment ?
Thomas : Ces derniers jours : Civil Civic, Tyga, Buraka Som Sistema, Tame Impala, des vieux titres de Dre…
Clotilde : Todd Terje, David Shaw and the Beat, Fuck Art Let’s Dance, Undressed in Dresden.
Cyril : Beak (>>), Principles of Geometry (Burn the Lands and Boil the ocean), Gary Numan (The Pleasure Principle) : je me fais un fixette sur les synthés vomito.

Quels sont vos morceaux pour (mieux) baiser ?
Thomas : Je me souviens jamais réellement de ce que j’écoute dans ces moments, mais je dirais que la douceur de Chet Baker est un truc qui me convient bien… Ou alors le saxo de John Coltrane peut-être.
Clotilde : Les Fleurs de Minnie Riperton, n’importe quel morceau de l’album Virgin Suicides de Air, du Prince, Hot Lips de Pacific, French kiss.
Cyril : Kill for Love des Chromatics.

Photo en une par Bastien Bdm pour QHUIT

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